Par Méréva Balin
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Trente ans après l’effondrement de son clocher qui avait obligé les paroissiens de Guernes (Yvelines) à se réunir dans une grange du village pour suivre les offices, l’église Notre-Dame de l’Assomption renaissait de ses cendres le 10 janvier 1954 lors d’une messe présidée par l’évêque de Versailles de l’époque, Monseigneur Alexandre Renard (1906-1983).
C’est cette date que le père Alain Eschermann, aujourd’hui curé du groupement paroissial de Limay-Vexin, et l’association de chrétiens du Vexin entendent commémorer avec une messe solennelle le 10 janvier 2024 à 18h. L’office doit être présidé par l’actuel évêque de VersaillesMonseigneur Luc Crépy.
Le vœu d’un abbé
Il sera beaucoup question d’un homme lors de cette célébration : l’abbé Clément Grouet (1911-1957). Nommé curé de la paroisse en 1945, l’ecclésiastique découvre un édifice en ruine à son arrivée.
« Il a été profondément bouleversé par la vision d’une statue de la Vierge Marie cassée en deux au sol et il a fait le vœu de reconstruire une église en son honneur, raconte Jean-Paul Landrevie, professeur d’histoire honoraire et auteur de Différents ouvrages sur le patrimoine guernois. Il a mené une vie de sacerdoce consacrée à ce projet. »
Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, l’abbé ne peut en effet compter sur aucune subvention publique. Il parcourt donc la France à la recherche de dons.
« Avec sa sœur, professeure de dessin, et deux élèves de cette dernière, l’abbé Grouet a fait un pèlerinage en Peugeot 402. Il distribuait ce qu’on appellerait aujourd’hui des flyers à la sortie des restaurants de Deauville (Calvados) afin de recruter des donateurs, il a fait des prêches dans différentes paroisses et il semble même qu’il se postait à la sortie des cabarets parisiens pour convaincre les fêtards. »
Naissance de la Fête des cerises
Le curé crée aussi la réputée Fête des cerises qui animera le village tous les lundis de Pentecôte jusque dans les années 1970. Des artistes à la renommée nationale, comme Georges Guétary (1915-1997) ou le groupe Les Compagnons de la chansons’y sont notamment produits.
La manifestation réunissait lors des années les plus fastes plusieurs milliers de spectateurs dans un village qui ne compte alors que 400 habitants (contre 1075 aujourd’hui).
L’art sacré au rendez-vous
Que l’on soit croyant, féru de patrimoine local ou amateur d’art, l’intérieur de l’église Notre-Dame de l’Assomption vaut le détour.
Quelques vestiges de l’ancien édifice religieux ont pu être sauvés et y ont retrouvé leur place, comme une statue de Jésus-Christ datant du XIVe siècleune autre de la Vierge Marie et une dernière représentante Saint-Jean.
« Le calvaire (croix disposé à un carrefour en général-NDLR) qui se trouvait au milieu du cimetière et qui date du XVIe siècle a été mis à l’abri sur une colonne dans l’église. Une copie remplace cet objet inscrit à l’inventaire des monuments historiques dans le cimetière. »
La pièce ancienne la plus connue demeure cependant le retable. Classée aux monuments historiques, cette sculpture en bas-relief en bois polychrome remonte au XVIee siècle et représente sept scènes de la Passion du Christ.
L’œuvre avait été transférée à la collégiale de Mantes-la-Jolie suite à l’effondrement du clocher avant de revenir dans son église vexinoise lors de sa réouverture.
Des vitraux créés par Maurice Rocher
Du côté de la modernité, ce sont pas moins de 21 vitres dessinés par l’artiste Maurice Rocher (1918-1955) et réalisés par le maître verrier Jacques Degusseau qui ornent les murs.
« Il s’agit d’un ensemble cohérent et remarquable, un des rares où on ne voit que la patte de Maurice Rocher avec des personnages stylisés pour procurer des émotions. »
L’artiste peintre expressionniste s’est notamment inspiré des visages de son épouse et de son fils pour représenter la Vierge Marie et Jésus-Christ enfant.
Une dernière restauration à venir
Enfin, l’église Notre-Dame de l’Assomption dispose d’un chemin de croix offert par Ernest Gabard (1879-1957).
« C’était un sculpteur renommé qui a fait don de son œuvre à l’abbé Grouet. Il n’en existe que deux de ce type, le second est dans l’église Notre-Dame de Pau, sa ville d’origine. »
Ces quatorze panneaux de plâtre ont subi les affres du temps. Une restauration, estimée à 7 000 €, s’avère nécessaire. « Grâce à son inscription à l’inventaire des monuments historiques en juillet 2021, une partie du coût (65 %) sera prise en charge via une subvention, affirme-t-il. Néanmoins, il nous faut rassembler la somme restante. »
Au terme de la messe solennelle, une rencontre autour d’une galette des Rois partagée est prévue dans le foyer rural de la commune. Une centaine d’exemplaires de la troisième édition de la brochure Notre-Dame de Guernes : un écrin méconnu de Jean-Paul Landrevie ainsi que l’ouvrage Patrimoine en Seine édité par l’association Valeur et Culture y sera proposé à la vente.
« L’association des chrétiens du Vexin a également été lancée une souscription, précise l’historien. L’argent sera reversé à la mairie pour compléter son budget de restauration. »
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